Qu'as-tu fait?

Flashback

Cela faisait plusieurs jours que je n'étais pas sortie de chez moi. Aucune envie, aucun courage. Je traînais dans un vieux pyjama dans mon appartement, avec pour seule compagnie la télé et mon chat. Ce matin-là, j'étais passé dans la cuisine et j'étais allé dans le frigo dans l'espoir d'y trouver un truc à manger. Des fraises, pourquoi pas. Ou... tout autre chose de mangeable. J'ouvris la porte du frigo et soupirai doucement en n'y trouvant pas grand chose. Il faudrait vraiment que je pense à sortir... Un jour... Je refermai la porte et mon regard se posa sur un petit billet qui énonçait un rendez-vous. Je regardai l'heure. Si je me bougeais maintenant, je pourrais y être à temps... Un stupide entretien... Je n'avais guère envie de sortir, je n'avais guère envie de voir des gens, je voulais juste rester seule encore un temps... Je finis par me préparer avant d'aller à mon rendez-vous. Surprise. Si j'avais su, je serais restée plongée dans ma solitude. Finalement l'épreuve passée, j'allai acheter rapidement de quoi manger pour ensuite rentrer. Je pris le courrier qui s'entassait dans ma boite aux lèvres et retournai à mon appartement. Je déposai les clés sur le meuble après avoir bien verrouillée la porte. Facture. Facture. Lettre de la fac. Facture. Tiens... Une enveloppe non cachetée... Je fronçai les sourcils et l'ouvris. Une jolie feuille. Une très jolie écriture. "Ne crains plus rien. Tu es vengée." Qu... Quoi? Mon coeur s'emballa. Cette écriture, je la connaissais... Le fait que quelqu'un d'autre sache ne me plaisait pas. Et... Je n'étais pas à l'aise, ni même rassurée... Je relus plusieurs fois ce simple petit mot avant de tout foutre dans un tiroir...

Fin du flashback

Aujourd'hui.

J'osai envie remettre un pied à la fac. Comment justifier mon absence? Et puis flûte. Je n'avais nullement besoin de justifier quoi que ce soit. Ils n'avaient qu'à se faire voir. Ce qui m'arrivait ne regardait que moi et certainement pas les étrangers qu'ils étaient, quel que soit leur autorité au sein de la fac. J'assistai à un cours, rapidement. Mais je n'y arrivais pas. Trop de gens, trop de bruit, trop de trop. A la fin du cours, je me dirigeai vers la bibliothèque. Peut-être y trouverais-je assez d'occupation pour ne pas y penser. J'entrai dans l'immense bâtisse. Je cherchai un coin tranquille, un coin où je pourrais rester seule. Ce fut alors que je le vis. Seth... Etait-ce bien lui qui m'avait donné ce mot ou... faisais-je totalement fausse route? Et si je me trompais...? Mais en même temps... J'avais besoin d'en avoir le coeur net. J'avais besoin de savoir en quoi je pouvais ne plus avoir rien à craindre, en quoi j'étais vengée... Timidement, avec une certaine peur, je m'approchai de lui doucement. « Seth...? » Cela faisait déjà un long moment que je le connaissais. Plus ou moins. C'était un homme assez solitaire mais pas bien méchant dans le fond, au contraire. Du moins, il ne m'inspirait pas de la peur. Pourtant... j'avais peur des hommes... Je ne me méfiais pas du moindre regard, je savais bien qu'ils n'étaient pastous comme ça... Mais je restais malgré tout sur mes gardes. J'avais le mot sur moi. Je le sortis de ma poche et lui tendis. Il était plié. « Est-ce-que... C'est toi qui a mis ça dans ma boîte aux lettres...? » Je n'osais pas le regarder dans les yeux. S'il savait ce qui m'était arrivé, je n'oserais sûrement plus jamais...

Qu'as-tu fait?

C'était difficile à expliquer. Je ne saurais vous dire exactement ce que je ressentais. Trop de choses me perturbaient. Entre la honte que j'éprouvais, la peur, l'angoisse constante... Je ne savais pas qui était cet homme dans la ruelle, je ne savais pas pourquoi il avait posé ses mains sur moi et en vérité, je n'avais pas envie de le savoir. J'avais juste envie de tout oublier, de tout effacer de ma mémoire mais on savait bien que c'était impossible. J'allais devoir vivre avec cette salissure sur moi, au quotidien. J'étais un peu perdue depuis que j'avais trouvé l'enveloppe dans ma boîte aux lettres. J'imaginais que c'était Seth, ayant déjà eu des feuilles qu'il avait écrites en mains mais je n'étais plus sûre de rien. Le croisant à la bibliothèque, je ne pus m'empêcher d'aller vérifier. J'avais besoin de savoir. De savoir si c'était lui, ce qu'il savait, ce qu'il avait fait... J'avais choisis la bibliothèque pour le calme et la solitude que l'endroit allait me procurait, je n'avais pas pensé une seule seconde que je tomberais sur lui. Le hasard faisait parfois bien les choses... Je m'approchai pour l'interpeller et il me salua avec un petit sourire. Je n'osais pas le regarder dans les yeux, c'était trop dur. J'entrai directement dans le vif du sujet en lui tendant l'enveloppe que j'avais sur moi en lui demandant cash si c'était lui qui avait mis ça dans ma boîte aux lettres. "Tu connais déjà la réponse,non?" Je ne pouvais pas en être sûr à cent pour cent mais je le soupçonnais d'en être effectivement l'auteur. "C'est moi... Assieds toi, si tu veux qu'on en parle" Je secouai doucement la tête. « Je... Je ne veux pas m'asseoir... Juste... » C'était difficile à demander. Je regardai autour de moi avant de finalement m'installer en face de lui, crispée. Cela se voyait que je n'étais pas dans mon état normal. « Qu'est-ce-que... Qu'est-ce-que t'as fait...? » Ce n'était qu'une partie de mes questions. J'enchainai, demandant très doucement et en regardant nerveusement autour de nous, juste au cas où des gens arriveraient: « J'ai... aussi besoin de... savoir ce que tu sais... » C'était vraiment dur. J'étais hantée par les images de cette soirée là et je devais en plus essayer de savoir ce qu'il savait sur ce qu'il s'était passé... J'allais peut-être même devoir entendre ça, et ça n'était pas vraiment pour me faire plaisir ou me remonter le moral, bien au contraire...

Qu'as-tu fait?

J'ignorais encore la façon dont j'allais réagir. Jusqu'à présent, je pouvais constater que je ne réagissais plus de la même façon, que je n'étais plus la même. Je le savais, je pouvais facilement le remarquer de moi-même. Je me connaissais, avant que ça n'arrive. Je connaissais mes habitudes, tout ça. Avant, je n'avais pas peur de sortir, je ne restais pas durant des jours cloitrée chez moi. J'étais souvent partante pour aller passer une bonne soirée entre amis dans un bar. Mais je savais que maintenant, je serais beaucoup plus réticente pour tout ça. Je le sentais. Quelque chose s'était brisé en moi. Et cette chose ne serait pas réparée. Jamais. Je m'étais finalement assise, très nerveuse. Presque angoissée. J'étais seule avec un homme... qui m'avait peut-être vengée mais qui restait un homme malgré tout. "Pour commencer, essaye de te détendre un peu... tu crains rien ici, ni avec moi, d'accord?" Essayait-il d'être comique? Parce que pour être honnête, si c'était le cas, il devrait changer directement de voie. Je ne le trouvais absolument pas drôle. Que je me détende? Parce que je ne craignais rien avec lui? Je voulais bien y croire, j'étais même sûre d'être en sécurité près de lui. Mais le problème était que je ne pouvais pas faire autrement. J'avais peur, c'était comme ça et pas autrement. Lorsque je prenais le courage de sortir, je regardais parfois derrière moi, juste au cas où. "Ce que je sais, c'est que ce type t'a fait du mal... Alors j'ai agi en conséquence..." Cela ne répondait pas réellement à mes questions. C'était trop vague, trop... ça n'était pas réellement une réponse. Je devais être sûre. "C'est vague... j'ai... J'ai besoin de vraies réponses..." Et peu importait les conséquences, peu importait la douleur que j'allais ressentir en entendant tout ça. J'avais besoin de vraies réponses, pour ensuite savoir comment réellement réagir face à lui, face à la situation. "Je trouve que j'en ai pas encore fais assez d'ailleurs... Et ne t'en fais pas, j'ai pas commis de crime" Je baissai les yeux. Je refusais l'idée que, peut-être, il pourrait s'attirer des ennuis à cause de moi. Je m'en voudrais vraiment s'il venait à avoir des ennuis. "Tu n'auras pas d'ennuis, rassures moi...?"

Qu'as-tu fait?

Je me sentais perdue face à Seth. Comment pouvais-je savoir quoi dire ou quoi faire sans savoir ce qu'il savait ou ce qu'il avait lui-même fait? Je posai mes affaires sur la table, mon sac pour être précise. D'une main, je tenais nerveusement mon gilet fermé, comme si je ne voulais pas que l'on voit un peu trop mes formes. Je ne m'habillais pas pour autant dans des sacs à patates mais je n'avais qu'un t-shirt, un jean, des baskets et un gilet pour ne pas paraître provocante. Au fond, peut-être que je l'avais été ce soir là? J'avais peut-être fait passer un message sans m'en rendre compte et j'en avais subis les conséquences..? Mon autre main était sur ma cuisse et je la bougeais nerveusement, d'avant en arrière, vers le genoux, puis vers moi. Je finis par arrêter parce que ça me stressait au final encore plus que je ne l'étais déjà. "Adaline je... suis pas sure que t'ai besoin d'entendre ça..." Et que pouvais-je bien avoir besoin d'entendre? Sérieusement? Étais-je vraiment à ça prêt? "Seth... Je crois pas... Je crois pas être encore à ça prêt... Et je ne sais pas moi-même ce dont j'ai besoin alors... Comment pourrais-tu le savoir...?" Je ne le regardais pas. Mon regard vaqua autour de nous. Je n'arrivais pas à rester sereine, j'étais toujours obligée de regarder sans cesse autour de moi, juste au cas où. "S'il te plait Seth... J'ai... J'ai besoin et j'ai le droit de savoir ce que tu sais et ce que t'as fais... ça... ça me concerne quand même!" Je soupirai doucement.

"Ne t'en fais pas pour moi, il n'y a aucun moyen que la police remonte jusqu'à moi, je m'en suis assuré" S'il cherchait à me rassurer, c'était peine perdue. Je secouai doucement la tête. S'il mentionnait la police, c'était qu'il avait dû faire une bêtise, j'en étais persuadée. "Tu ne me rassures pas Seth, tu sais ça?" Je baissai encore plus les yeux en entendant la suite de ce qu'il avait à dire. "En tout cas, il n'est pas prêt à retrouver la liberté... Entre l'hosto, puis la prison..." Il l'avait sans doute tabasser. Et l'avait dénoncé aux flics mais certainement pas pour ce qu'il m'avait fait, sinon j'aurais déjà été contactée pour témoigner, pour avoir la moindre preuve pour l'inculper de ce dont Seth l'aurait accusé. De la drogue, peut-être. Oui, il l'avait sûrement dénoncé par rapport à de la drogue ou encore par rapport à... je ne sais pas. Et peu importait, il l'avait dénoncé pour quelque chose et c'était tout ce qui comptait. Je dis doucement, hésitante: "Te mêles pas de ça... J'ai... J'ai pas besoin que quelqu'un s'en mêle..." Ce que je disais allait peut-être l'énerver. Je ne devrais pas laisser passer une telle agression mais je n'y arrivais pas. Il m'avait brisée et pourtant, tout ce que je voulais, c'était oublier... J'aurais dû porter plainte, j'aurais sûrement dû faire quelque chose pour éviter qu'il ne recommence. Mais je n'en avais pas la force. Je voulais juste rester seule et tenter d'oublier tout ça, et certainement pas me lancer dans un procès long et... Je n'en aurais pas la force. Je n'aurais pas le courage de tout raconter une dizaine ou une vingtaine de fois à de parfaits étrangers ce que cet homme m'avait fait. Et je savais que ma réaction envers Seth, et envers mon agresseur risquait d'énerver le jeune homme assis en face de moi...

Qu'as-tu fait?

Je me sentais mal à l'aise. Je ne savais pas comment réagir face à lui. Je ne savais même pas si j'avais raison d'être venu lui parler pour trouver des réponses à mes questions. Pourquoi n'avais-je simplement pas pu laisser courir? Il avait fallu que je satisfasse ma curiosité trop encombrante au détriment de ce que je pouvais ressentir et du mal que j'allais sans doute moi-même m'infliger du fait de cette curiosité trop importante. Il m'informa qu'il ne faisait qu'une hypothèse de ce dont je pouvais avoir besoin. "Tu as raison... ça te concerne... Je... Je peux pas me mettre à ta place non plus..." Au moins, nous étions d'accord sur ce point là. Tout ça me concernait et il ne pouvait pas se mettre à ma place. Seules les personnes dans mon cas pouvaient, sinon personne et ça c'était sûr. "Je pense savoir qu'il a, au minimum, tenter d'abuser de toi..." Je frissonnai et jetai un oeil autour de moi. C'était dur d'entendre ça. Vraiment dur. Et encore, il était loin de la vérité. "Tu ne sais pas grand chose, au fond..." Mais comment lui dire? Devais-je seulement lui dire? Je n'en avais pas spécialement envie. Et je ne voyais pas trop ce que ça pourrait bien changer... Quoi que... "Ce que j'ai fais... Je l'ai proprement massacré. Je lui ai brisé méthodiquement chaque os des jambes, puis un bras, le nez, la mâchoire, j'ai pas fait le recensement. Je lui ai ensuite injecté une dose d’héroïne, pour faire croire à un règlement de compte, les gros dealers fonctionnent comme ça, juste assez pour lui faire frôler l'overdose. J'ai aussi planquer un gramme de cocaïne dans sa poche et je l'ai abandonné à son sort. Je sais que quelqu'un est passé et à appeler une ambulance et la police peu après." J'avais le regard baissé et à l'évocation de tout ça, je ne pouvais nullement plus le relever. Seth... Dans quoi t'étais-tu embarqué encore? Je soupirai doucement, tentant de rester aussi "sereine" que je le pouvais. Enfin... si je pouvais dire que j'étais un tant soi peu sereine... "Je ne m'emmêle pas Adaline, j'ai fini de le faire. Je ne me suis jamais mêler de ta vie, je ne vais pas commencer aujourd'hui, mais je ne pouvais simplement pas laisser passer ça... Surtout que ça te concerne..." Je pris mon courage à deux mains pour enfin répondre doucement: "Je... Tu n'aurais même jamais dû t'en mêler Seth... ça... ça ne te regardait pas..." Je me sentais à présent redevable envers le jeune homme. Malgré tout, j'aurais voulu pouvoir le remercier pour avoir voulu m'aider. "Pour être sincère, je ne voulais pas te laisser ce mot à la base... Puis j'ai réfléchis, et je me suis dis que ça te ferait peut être un peu de bien de savoir que tu ne risquais pas de le croiser au détour d'une rue..." J'hochai légèrement la tête. Le problème était que je ne savais pas comment le remercier... "Je ne sais pas comment... comment te remercier..." Je n'osais toujours pas le regarder dans les yeux, mon regard était fuyant, emplit de peur malgré tout.

Qu'as-tu fait?

"Je ne veux pas de remerciements Adaline. Après tout, ça ne me regardait pas non? Alors si tu veux me remercier, évites simplement ce genre de propos." Il avait tout de même fait ma vengeance. Comment ne pas vouloir le remercier... Enfin, j'ignorais si lui dire merci seraient les mots les mieux choisis mais que dire de plus? Il avait fait passer le message à ce sale type, qui ne recommencerait sûrement plus de si tôt. Et dans un sens, j'avais envie de lui dire merci, merci pour toutes les femmes qu'il avait peut-être indirectement protégées. Pour moi, c'était trop tard, mais qui sait ce qu'il aurait pu faire si Seth ne l'avait pas tabassé? Je choisis de ne pas lui répondre, j'ignorais encore comment réagir exactement envers lui. Je ne savais même pas qu'il avait toujours un oeil sur moi, à distance, juste au cas où. "Excuse moi, je sais que c'est pas facile pour toi... Mais je l'ai pas fais pour que tu me remercies ou que tu te sentes redevable... Que du contraire... Je veux pas un merci pour ça..." C'était sûrement à cause de mon silence qu'il disait ça. J'hochai doucement la tête. N'empêche que je continuerais à me sentir redevable encore longtemps. Je regardai autour de moi. Je ne savais pas trop quoi ajouter. Que dire? Que faire? Sincèrement, j'étais perdue... "Je... J'aimerais pouvoir faire un bond dans le passé..." Mais qu'est-ce-que je lui racontais? Franchement? C'était n'importe quoi! Il devait s'en douter que j'aurais aimé faire machine arrière et tout faire pour éviter ça... Et le pire, c'était que je continuais à lui dire ce que je ressentais, ce que j'aimerais... Ridicule. "J'ai... Je sais pas quoi faire, je me sens complètement.. perdue... Je fais... Je fais semblant que tout va bien devant les autres alors que... j'ai juste envie de me terrer dans un trou de souris et ne plus en sortir... Et je considère mon appartement comme mon fameux trou de souris..." Pathétique. Je devais avoir l'air réellement pathétique. Il n'y avait aucune autre façon de décrire l'effet que je devais procurer à cet instant précis...

Qu'as-tu fait?

"Et je donnerais n'importe quoi pour être sorti fumer une cigarette à ce moment précis..." Oh, peut-être que ça n'aurait pas changé grand chose... Au fond, comment aurait-il pu savoir que quelques mètres plus loin, je serais agressée? Et puis... J'avais eu mon sauveur... Il n'était certes pas arrivé assez tôt pour éviter ce que j'avais dû vivre mais qui sait si je serais encore vivante à l'heure actuelle? Personne ne pouvait savoir s'il m'aurait laissée en vie après l'acte.. Et personne ne pouvait savoir si je n'aurais pas eu d'autres conséquences. Le petit malin ne s'était pas protégé... J'étais allé cherché une pilule du lendemain, par précaution, même s'il n'avait pas eu le temps d'aller jusqu'au bout, faignant d'avoir oublié ma pilule et avoir couché avec mon petit-ami... Tu parles, je n'avais même pas de petit-ami... Mais il n'était pas question que la pharmacienne capte quoi que ce soit à la situation. Quoi qu'il en soit, je dis doucement à Seth: "Dis pas ça... ça n'aurait peut-être pas changé grand chose... Et..." J'eus envie de lui parler de Nolàn. Ce jeune avocat qui m'avait aidée et que j'avais fuis... Par peur, par honte, sans doute. "Si tu savais... Comme je te comprends Adaline... Et c'est normal que tu te sentes perdue... et que tu veuilles seulement te terrer chez toi... Parce que c'est peut être le seul endroit ou tu te sens encore en sécurité..." Je l'écoutais sans rien dire. Oui, je me sentais en sécurité chez moi... Maintenant que j'avais vu que personne ne rôdait autour, je me sentais sereine dans mon appartement. "J'aimerais pouvoir t'aider... te soutenir... C'est pas mon rôle, et c'est surement pas moi que tu voudrais à cette place, mais je supporte pas l'état dans lequel tu es... ça me tue de te voir comme ça..." Je souris doucement et tristement. "Tu sais... Je crois... Je crois que ce n'est le rôle de personne dans mon entourage... Je... Je n'en ai parlé à personne, j'ai pas envie... J'ai pas envie qu'on me regarde comme tu le fais..." Je ne l'avais peut-être pas regardé beaucoup mais je n'étais pas idiote. Je sentais son regard. Plein de tristesse, de culpabilité sans doute. Un mélange de tout, peut-être. "Je ne pourrais même pas te dire que je te protégerais... Ce serait hypocrite... Alors que j'ai pas été là quand j'aurais pu le faire..." Je relevai alors mes yeux vers lui. J'avais raison, il se sentait coupable. "S'il te plait, ne te sens pas coupable... Tu pouvais pas savoir... Un ami a voulu me raccompagner, j'ai refusé... Et pourtant, c'est pas plus de sa faute que de la tienne... C'est... C'est pas de ta faute..." Je ne savais pas quoi dire de plus. Ce n'était pas lui qui m'avait agressée. Le seul fautif était ce salopard. Personne d'autre. Ou peut-être moi, si je l'avais provoqué, même inconsciemment. Mais ça n'était ni de la faute de mon ami, ni la faute de Seth. Je rebaissai les yeux. J'avais besoin de réconfort. Etait-il possible que je prenne mon courage à deux mains pour me rapprocher de lui? Non, pas encore... J'avais un peu confiance en lui, je savais que tout les hommes n'étaient pas comme ça... Et si il faisait doucement, je n'aurais pas peur, n'est-ce-pas? Je n'avais pas envie de rester fermée, coincée comme ça... Je voulais... J'aurais juste tout donner pour retrouver ma joie de vivre et mon enthousiasme, mon envie de rire, d'avant. N'osant finalement pas bouger, je toussai légèrement. Je crois que je tombais malade... Je n'arrivais pas à m'approcher de lui et pourtant, je restais là. Je n'arrivais pas à me lever et à rentrer chez moi. Je sentais que tant que j'étais là, j'étais autant en sécurité que chez moi avec Luciole.

Qu'as-tu fait?

"Je suis pas vraiment de ton entourage." Je souris doucement. En même temps, un entourage, j'en avais peut-être plus tant que ça... Enfin si, j'avais mes parents et des amis. Mais là n'était pas la question. Quoi qu'il en était, je le considérait malgré tout comme un membre de mon entourage, quoi qu'il en dise ou quoi qu'il en pense. Il m'avait vengée, m'aurait protégée s'il avait pu et su ce qui allait se passer. Il était un peu comme mon ange gardien, même s'il avait fait défaut ce soir là. Je ne répondis cependant rien. Je ne voulais pas dire quoi que ce soit à ce sujet, finalement mon entourage était encore une autre histoire. Et je n'avais pas envie d'entrer plus précisément dans ce sujet à l'heure actuelle. "Et je comprends parfaitement que... T'en parles pas... et loin de moi l'idée de te dire que c'est pas bien, tu le gères comme tu le peux et je serais pas celui qui te ferait parler. Mais je t'écouterais toujours. Quand bien même tu voudrais me parler de ton chat qui a perdu une griffe." Je ne pus m'empêcher de rire doucement. C'était gentil de dire ça et j'avais en plus justement un chat. Je souris doucement en levant mon regard vers lui. "Luciole serait ravie que je parle d'elle... Merci... C'est... C'est gentil..." Puis il reprit la parole après que je lui ai dit que je n'avais pas envie que l'on me regarde comme il le faisait. "Comment penses tu que je te regarde Adaline?" C'était pas bien compliqué. "Tu vas dire que j'ai tort mais je ne suis pas idiote et ce n'est pas parce que je ne te regarde pas dans les yeux que je ne sens pas tout ça..." Je pris quelques secondes avant de lui donner une réponse complète. "Avec de la peine, de la culpabilité... Peut-être même de la pitié par moment..." C'était comme ça que tout le monde me regardait... Ceux qui savaient... Nolàn n'avait pas su comment réagir face à moi quand nous nous étions retrouvés, finalement par hasard dans son cabinet, Alexander se sentait coupable et me regardait avec un peu de peine aussi, et Seth ne faisait pas exception à la règle...

Le jeune homme posa sa main sur la table. Je pouvais la saisir. Ou non. "T'as pas l'air bien... T'as plus fais un vrai repas depuis quand?" Un vrai repas? Genre, un vrai de vrai? J'haussai doucement les épaules. "J'en sais trop rien... Mais ça va, je vais bien... J'ai sûrement juste pris un peu froid..." Je souris doucement. Que dire de plus? Je n'allais pas lui dire clairement que ça faisait depuis ce fameux soir que j'avais pas manger correctement un repas complet et équilibré. J'avais sûrement perdu un peu de poids d'ailleurs. Même ça, je n'en savais rien... "Je te propose un truc... Je te raccompagne chez toi, si tu le souhaite, je passe un peu de temps avec toi et je te fais une bonne soupe, sinon, je rentre chez moi. ça te va?" Je ne savais pas trop. Mais au fond, s'il me voulait du mal, il ne m'aurait certainement pas vengée, pas vrai...? Je posai doucement ma main dans la sienne, bien que je fus tremblante et hésitante malgré tout. "Je veux bien... que tu me raccompagnes chez moi... Mais pour la soupe, pas sûr que tu trouveras grand chose chez moi..." Je souris doucement. J'avais acheté quelques trucs deux jours avant, mais juste le nécessaire. A boire, quelques fruits, des pâtes... ce genre de petites choses. Enfin, peut-être trouverait il son bonheur, tout dépendait de quoi il avait besoin. "Enfin... ça dépend de quoi tu as besoin, tu trouveras peut-être ce qu'il te faut quand même..." Je souris doucement en voulant retirer ma main...

Qu'as-tu fait?

"Il n'y a pas de quoi... C'est mignon comme nom, Luciole... " Je souris doucement. C'était un nom mignon, oui, c'était vrai. Et Luciole était également mignonne et vraiment adorable. Elle était câline, gentille, douce... Bref, je n'avais nullement à me plaindre. Sa présence était réconfortante et croyez-moi, j'en avais besoin ces derniers temps. Et puis je lui dis ce que je voyais dans son regard. De la tristesse, de la pitié... Voila ce que je voyais. "Tu n'as pas tort, sauf pour la pitié. Je n'éprouve jamais ce sentiment, et tu n'as rien qui puisse me faire ressentir ça à ton égard. De la tristesse, oui et de la culpabilité aussi. Je ne le nie pas, mais quel que soit mon regard Adaline, au fond de moi, tout ce que je vois, c'est que tu es là et que je te lâcherais pas, je t'aiderais à te reconstruire, si tu acceptes mon aide... Parce que je veux à nouveau t'entendre rire, voir tes yeux pétiller de malice. Tout ça." C'était gentil, ce qu'il disait. Mon regard était triste mais touché malgré tout. Je souris très légèrement. Parce que je persistais dans mon idée que si, il éprouvait une certaine forme de pitié. Qui n'éprouverait pas de la pitié pour la pauvre fille qui a été violée, qui n'ose plus sortir de chez elle, qui n'arrive même pas à assister à ses cours et qui sort une fois toutes les deux semaines pour faire des courses, et encore, elle prend le strict minimum pour que ça soit rapide? Tout le monde l'éprouverait. Et je ne pouvais pas leur reprocher ça. Mais c'était pour éviter de voir ce type de regards que je me taisais, que je ne voulais pas aller porter plainte. "Arrêtes... Je sais ce que je vois... Et... c'est une certaine forme de pitié.."

Je touchai sa main, sans même réellement savoir pourquoi. "Oui, surement, en même temps, c'est pas compliqué avec la météo qu'on a" Il effleura le dos de ma main à l'aide de son pouce. Oui, il faisait étrange comme temps et il était facile de tomber malade. Je prétextais ça mais au fond, même si je me nourrissais, je me nourrissais mal. Je l'informai qu'il pouvait toujours venir mais que ça n'était pas sûr qu'il trouverais son bonheur pour cuisiner. "Je trouverais de quoi faire, t'en fais pas" Je souris doucement. S'il le disait, il avait sûrement raison... "Tu dois rien faire d'important, tant que je suis a t'escorter?" Alors il allait vraiment me raccompagner chez moi et tenter de me faire un plat..? Je baissai les yeux un instant avant de me relever et de mettre mon sac en bandoulière. "Non, j'ai... Je n'ai rien à faire..." Et même si j'avais des trucs à faire, je n'en avais pas l'envie du tout. Je ne faisais pas grand chose depuis cette nuit-là. Je l'observai ranger les livres et prendre son sac. "On peut y aller, si tu es prête?" J'hochai doucement la tête et croisai mes bras sur mon gros gilet avant de me mettre à marcher pour aller vers la sortir du bâtiment. "Pourquoi... Pourquoi tu fais ça? Pourquoi tu veux me raccompagner, et... m'aider...? Je veux dire... Finalement, on ne se connait pas... On a... On a qu'Emile en commun..." J'avançai en regardant droit devant moi, tranquillement...

Qu'as-tu fait?

Je ne savais absolument pas comment me comporter avec Seth, sur quel pied danser. C'était assez bizarre. Je ne le connaissais pas plus que ça, je l'avais juste croisé par l'intermédiaire d'Emile, il y a quelques années maintenant. C'était quand je sortais encore avec le jeune homme. Une jolie histoire... Jusqu'à ce qu'elle prenne fin. Parfois, l'amour n'était pas suffisant pour sauver un couple. Mais nous étions restés amis et je savais que si j'avais besoin de lui pour quoi que ce soit, il serait là. C'était réconfortant. Notre rupture avait fait mal, c'était sûr, mais même si j'avais perdu mon petit-ami, j'avais gagné un ami. C'était donc tout bénéf', finalement. Quoi qu'il en soit, Seth restait un étranger. Alors pourquoi avait-il fait tout ça? Tabasser ce type et risquer d'avoir des ennuis, me raccompagner, vouloir me faire un repas un peu plus...sain que ce que je mangeais ces derniers temps,... Je n'avais pas pu m'empêcher de lui poser la question. J'avais envie et besoin de savoir, d'obtenir quelques réponses. "Disons que quand je t'ai rencontré, j'ai eu une sorte de coup de coeur, je me suis attaché à toi... On ne se connait pas plus que ça, c'est vrai, mais malgré tout, je fais attention à toi, de loin... Je suis un mec assez protecteur avec les gens qu'il aime... alors voila... Je sais pas si ça répond à ce que tu voulais mais... Dis toi que je fais pas ça pour un merci, une contrepartie ou je ne sais quoi encore... Je veux juste que tu ailles mieux, sans te forcer ou te juger, juste t'épauler et être la, si tu le veux." Une sorte de coup de coeur? J'avais un peu l'impression d'être un film ou une musique, un livre coup de coeur. Je souris doucement. "Comment peux-tu aimer ou juste apprécier une personne que tu ne connais pas?" Nous devions apprendre à connaitre les gens avant de se faire un avis sur la question, non? Il fallait apprendre à voir quels traits de caractère possèdent cette personne pour juger si on va l'apprécier ou non. Ne serait-ce qu'un minimum. Je crois. "Et... Si je comprends bien, tu m'as... surveillée...?" Je regardais toujours droit devant moi.

Il s'alluma une cigarette et pour la première fois depuis que nous avions quitter la bibliothèque, je jetai un oeil sur le côté pour le regarder. A quoi ressemblait le goût de la cigarette? Qu'est-ce-que ça faisait de fumer? Est-ce-que ça provoquait vraiment une sensation de relaxation, comme j'avais déjà entendu? J'avais entendu que certains fumaient quand ils étaient stressés, quand ils allaient un peu mal. Je demandai doucement: "Dis moi... ça fait vraiment du bien de fumer...? Genre... Quand on est stressé, ce genre de trucs...?" J'étais curieuse, et... J'étais assez nerveuse et angoissée alors... si ça pouvait me faire un peu de bien et me détendre parfois, je n'allais certainement pas dire non. Je n'avais jamais pensé ou voulu fumer mais depuis cette nuit-là, je n'étais plus la même. Et j'avais besoin de trouver tout ce que je pourrais pour essayer de... d'aller un minimum mieux. "Je sais que mon comportement peut te paraître étrange... mais... Je suis un peu bizarre dans mon genre, mais pas méchant." Je souris doucement. Je voulais bien le croire... J'hochai doucement la tête en resserrant un peu plus mes bras autour de moi.